par roseant » 18 Fév 2022, 22:22
Je l'ai fait deux fois avec mon ancien voilier de 9 mètres, du Québec vers la France et de la France vers le Québec, en passant par les Acores.
Vous semblez avoir un bateau assez bien équipé. De façon générale. En mer on établit une routine quotidienne en fonction des trois priorités suivantes. Dans l'ordre: prendre soin du bateau (qui est votre nacelle de survie), prendre soin de l'équipage (qui doit toujours rester en bonne forme, physique et mentale) et; prendre soin de la navigation (gérer sa route et sa progression en fonction de la météo).
Avant de penser à l'ajout d'équipement, la question à poser est d'abord: qu'elles sont les savoirs et les habiletés à posséder ou à améliorer pour répondre aux trois priorités énoncées plus haut. En répondant à cette question, les items manquants feront surface.
Le bateau doit être en très bon état. Tout ce qui est un peu trop vieux, usé ou potentiellement fragile est fortement susceptible de revenir vous hanter.
Un bateau de cette taille pose deux problèmes principaux: espace et poids. Être à trois personnes là-dedans pendant 15 à 20 jours est assez demandant. Au delà de trois, c'est la foule. Avec une cabine arrière, vous avez au moins deux couchettes utilisable en permanence (important, la gestion des couchettes). La pince avant devient vite invivable. Ensuite, l'avitaillement nécessaire à trois personnes pendant 20 jours représente un poids considérable qui hypothèque davantage les bateaux plus petits. Attendez-vous à voir votre ligne de flottaison baisser et vos performances baisser.
Pour répondre plus spécifiquement à vos questions.
- Bilan électrique: avec le frigo, les lumières, le pilote et l'électronique en fonction sur 24 hrs, vous avez fort probablement dépassé la capacité de vos panneaux solaires. Ne sous-estimez la consommation d'un ordi portable. Ça tire pas mal de jus. Si vous ajoutez en plus des trucs comme un dessalinisateur, vous vous enfoncez plus loin dans le rouge. Avec un bon bilan électrique en main, vous pourrez agir sur deux fronts: baisser la consommation ou augmenter la production.
- Options pour baisser la consommation: si ce n'est pas déjà fait, changer vos ampoules pour des leds, ajouter un régulateur d'allure pour éteindre le pilote, gros consommateur.
- Options pour augmenter la production: autres panneaux solaires ou remplacement des existants pour des plus performants, régulateur Mppt si vous n'en n'avez pas déjà un; ajout d'une éolienne (très efficace en mer) ou, acceptez de devoir faire du moteur tout les jours. J'ai volontairement laissé dans l'ombre l'hydrogénérateur pour deux raisons: je n'ai pas d'expérience directe de ces engins et, les fiches techniques que je consulte montrent souvent des performances assez bonnes au dessus de six noeuds, mais décevantes en deça. Tenir des moyennes à plus de six noeuds sur un trente pieds me semble optimiste. Mes moyennes tournaient davantage au tour de 120 milles par jour, donc 5 noeuds.
- Eau: nous avions 180 litres dans les réservoirs, auxquels il faut ajouter les jus et boissons diverses emportées. Il fallu 17 jours de Gaspé aux Acores et, à trois nous avions utilisé environ la moitié de nos réservoirs. Des touries supplémentaires sont possibles (songez au poids) ou alors le déssalinisateur (songez au bilan électrique et financier, beaucoup de maravédis en jeu). L'eau ne servait que pour boire, la cuisine et l'hygiène personnelle (vaisselle à l'eau de mer).
- Régulateur: le meilleur des équipiers, silencieux, qui ne boit pas, ne mange pas, ne consomme rien et surtout ne râle jamais. Toutefois et honnêtement, même si c'est génial en traversée, une fois revenu à la croisière côtière, le pilote est plus versatile et commode, pendant que le régulateur devient un peu encombrant sur la plage arrière. C'est plutôt cher mais son prix est à mettre en balance avec la nécessité d'augmenter la production électrique pour alimenter le pilote.
- Étai largable. J'en avait un, et j'en ai encore un. Mais il faut comprendre que son utilité est maximale pour le près. Le génois est un peu trop enroulé devient une voile misérable au près. Au près dans la brise, rien de vaut une belle voile taillée pour ça. Sur mon voilier de 9 mètres, avec une voile de brise sur étai largable, C'était facilement deux noeuds de plus au près serré, avec un meilleur cap et passage dans la vague. Par contre, il y a beaucoup de portant dans la route que vous envisagez, du moins à l'aller. Alternative à considérer: changer le génois. probablement prévu pour une navigation plus côtière, par une voile enrouleur pensée en fonction de la haute mer: plus petite, moins creuse, point d'écoute relevé, et donc susceptible d'un meilleur comportement dans la brise, au détriment d'une perte de performance dans le petit temps.
Bonne chance, c'est un projet exaltant.